La reprise d’entreprise en temps de crise

La crise actuelle n’épargne pas les candidats à la reprise d’entreprise : l’horizon se trouble, les discussions sont perturbées, les projets de cession sont reportés, les priorités changent, le stress s’accentue, l’attentisme et la frilosité s’installent. Comment, sur le plan personnel et relationnel, traverser au mieux cette période si particulière ? Tel était le sujet de notre intervention lors d’un atelier-conférence avec le groupe HEC Repreneurs le 14 avril 2020.

Une période à haute intensité émotionnelle

Sidération, colère, peur, tristesse face à la crise inédite que nous vivons… La psychologie nous apprend que tous ces ressentis sont normaux lorsque l’on subit un choc violent. C’est un passage obligé qui permet de faire le deuil d’un certain état du monde et d’accepter la nouvelle donne, pour mieux ensuite tourner la page, se projeter et se remobiliser vers le futur. Tout le monde le vit, les repreneurs, les cédants, les salariés. Chacun à sa manière, chacun à son rythme. Et cela vient avec divers symptômes physiques de fatigue, insomnies et autres maux.

Quels sont les risques ? Sur-réagir au stress associé et basculer dans l’agressivité, les difficultés relationnelles, les conflits ou bien le repli et la paralysie. Rester durablement bloqué sur un ressenti, s’enfermer dans la colère par exemple. Prendre des décisions hâtives sous le coup de l’émotion.

Comment gérer au mieux son stress, son énergie et ses relations ?

1- Ménagez-vous des bulles de ressourcement

Trouvez comment vous pouvez vous apaiser, lâcher prise, recharger vos batteries afin de baisser votre stress et vous remettre en énergie. Pour certains, ce sera la nature, la relaxation, la musique. Pour d’autres, ce sera le sport, le défoulement. En période de confinement, vos recettes habituelles ne fonctionneront peut-être plus, il vous faudra être créatif pour trouver des substituts.  A l’inverse, limitez ce qui vous pompe inutilement de l’énergie, abuser des actualités anxiogènes par exemple. Vous êtes lancés dans une course au long cours, la météo est agitée, redoublez de soins pour votre hygiène de vie physique et mentale.

2- Décodez vos ressentis

Si vous êtes hors de vous ou très angoissé, ce ne sera pas le bon moment pour prendre de nouveaux contacts ou des décisions importantes.  Prenez un temps de recul et de réflexion par rapport à vos ressentis, seul ou avec un tiers de confiance. Que vous apprennent-ils sur ce qui est important pour vous, vos besoins de sécurité, votre rapport au risque et à l’incertitude ?  Que pouvez-vous demander, mettre en place pour vous sécuriser et vous apaiser ?

3- Entourez-vous

En temps de crise, il est plus que jamais essentiel de ne pas rester seul. Identifiez vos personnes ressources : votre club de repreneurs, vos pairs, vos conseils, des amis, votre coach, nos Cercles Origata ?  Créez des rendez-vous réguliers. Dans un monde volatile, incertain, complexe, ambigu, qui bouge vite, vous serez plus intelligents et créatifs à plusieurs, vous croiserez les informations, les perceptions, les bonnes idées, les bons tuyaux. Vous pourrez aussi partager vos ressentis, vous n’êtes pas seul à vivre des hauts et des bas, les partager permet de relativiser.

4- Réévaluez vos priorités et vos projets

Analysez concrètement ce que cela change pour vous et révisez votre plan d’action sur les prochains mois.

Pour ceux qui sont en recherche de cibles : requestionnez votre projet, revisitez votre cadrage à la lumière de la nouvelle donne économique. Qu’est-ce que cela change pour votre marché, pour l’accès au financement. Voulez-vous rester sur le même secteur, percevez-vous de nouvelles opportunités ? Qu’avez-vous réellement envie de faire ? Êtes-vous toujours prêt à reprendre ?

Réfléchissez à votre calendrier de reprise : quel nouveau délai semble réaliste ? Occupez utilement le temps libéré, profitez des ressources gratuites actuellement proposées sans toutefois vous disperser, suivez des formations utiles à votre projet.

Pour ceux qui sont en pourparlers : questionnez le cédant pour réévaluer les risques à court et moyen terme et l’impact sur la valorisation, envisagez des modalités de paiement différé (earn-out ou crédit vendeur). Prenez en compte l’impact psychologique pour lui des conditions dégradées et le temps nécessaire à l’acceptation.

5- Gérez vos relations autrement

Dans cette période émotionnellement chargée, écoute et empathie sont plus que jamais de mise. Apprenez à mieux écouter pour mieux questionner. Si vous êtes en contact avec un cédant, gardez le lien, prenez des nouvelles. Soyez à l’écoute de ce qui se passe dans l’entreprise ; la crise va être révélatrice de beaucoup de choses : l’autonomie des équipes, le style de management du dirigeant, l’agilité. Apportez de l’aide si c’est pertinent, de l’information utile par exemple.  Évitez de mettre une pression contre-productive pour avancer, entendez-vous néanmoins sur un calendrier.

La période ouvre à plus de solidarité, certains auront plus de disponibilité, profitez-en pour renouer des contacts et en solliciter de nouveaux pour faire connaître votre projet et sonder le marché.

 

« Lorsque le vent souffle, certains construisent des murs, d’autres des moulins » – proverbe chinois

Toute crise est à la fois porteuse de dangers et d’opportunités. Quels objectifs vous donnez-vous pour les trois prochains mois ?

Estelle Mironesco & Christel de Bethmann

Archives

Commentaires

Vous devez vous connecter pour publier un commentaire.

Articles sur le même thème